J’ai été choqué, écœuré quand j’ai entendu un propos injurié d’un policier à l’endroit d’une journaliste de la presse. En suivant la vidéo qui montre la brutalité de la police, j’entends ‘’ je vais te rentrer’’. Waouh, c’est une mère de famille, une sœur, une femme d’autrui. Quels crimes a-t-elle commis pour mériter ce type d’injures ?
Juste pour avoir voulu manifester pour revendiquer un droit de l’Homme. C’est la réponse à cette question.
La police guinéenne est une institution brutale au cours des opérations de maintien de l’ordre. C’est une évidence. C’est une réalité
Est-ce que la marche organisée par les journalistes constituait une menace à l’ordre publique, à la sécurité publique ou une menace contre un droit de l’Homme à l’égard d’un individu ?
Pas du tout. Ils étaient dans leur droit pour exprimer leur opinion sur les menaces contre la liberté de la Presse.
Le droit à liberté d’expression et d’opinion par la Presse, est un droit de participation qui vise à garantir la dignité de l’Homme dans la parole publique ou sur les questions d’intérêt public. L’homme doit pouvoir en dire par principe, en dire ce qu’il sent et ressent, en dire dans le sens qu’il sent ou ressent, sous les réserves des modulations légitimes normées (Abdoulaye SOMA,Traité de Droit constitutionnel général, édition LIBES, 2022, p 438).
Il implique au minimum la possibilité de se prononcer ou de ne pas se prononcer sur un sujet donné, ou encore s’y prononcer suivant telles thèses, telles antithèses, telles synthèses ou telles autres hypothèses (Abdoulaye SOMA,Traité de Droit constitutionnel général, Ibidem, p 438). Ainsi, parmi ses différentes manifestations (le droit de diffuser et le droit de recevoir) figure le droit d’exprimer ses opinions sans entrave à travers la Presse.
Il ne faut pas occulter que la liberté de la presse est un droit de l’Homme qui est garanti aux personnes morales (télévisions, radio, presse écrite et presses en ligne). Ces organes ont des droits pour exprimer leurs opinions pour informer la société.
Aujourd’hui, les libertés publiques sont malmenées en Guinée. La liberté de presse est une liberté publique soumise à un régime juridique de protection et de promotion. Elle bénéfice du droit à la liberté de manifestation, de dénonciation, d’expression, d’opinion sur des sujets d’actualité concernant la vie sociopolitique du pays.
La presse est le quatrième pouvoir dans une société démocratique. Elle est un rempart contre l’arbitraire des autorités étatiques. La malmenée nous renvoie à une dérive autoritaire et dictatoriale. Son respect étant une condition nécessaire pour la réalisation des principes de transparence et d’obligation de responsabilité qui sont eux-mêmes essentiels à la promotion et à la protection des autres droits de l’Homme (voir CDH, « Liberté d’opinion et liberté d’expression», observation générale n°34 sur l’article 19 du PIDCP (2011)., paragraphe 3).
Ainsi, l’État guinéen aurait mieux à garantir le respect de la liberté de la presse. Même dans les régimes démocratiques, il existe une presse d’opposition qui critique le pouvoir en place. C’est un fait. Les autorités actuelles doivent l’accepter.
Dr Sadou DIALLO
Docteur en Droit public
Enseignant-chercheur
Consultant en droits de l’Homme