Samedi, comme dit dans l’invitation, les invités sont allés au Palais du Peuple. Et là on a vu la cohue devant le bus scolaire, avec appel, liste en main, comme de bons écoliers ! Ce n’est pas tout. Ils ont été installés dans la salle du Palais présidentiel et ont dû attendre près de deux heures pour voir arriver le Patron! Curieuse façon pour un militaire de respecter l’heure qu’il a lui-même fixée, et de respecter ses invités. Mais qu’importe! Ils ont eu droit à un copieux repas, aux frais du Prince…
A son arrivée, celui-ci a fait un discours disant que la Charte du CNRD a été rédigée sur la base de plus de 1800 mémos reçus…S’agissant du CNT, près de deux mois après le dépôt des dossiers, il renvoie la balle aux politiques… Sans aucune précision. Il dit ne pas savoir que faire avec plus de 1400 demandes. Et pourtant, c’est lui qui avait annoncé dans son message de nouvel an que le CNT serait mis en place très prochainement, sans donner de date. Il faut rappeler que pour sa part, le Premier ministre Mohamed Beavogui s’était engagé devant la CEDEAO à mettre en place le Parlement de la transition le « 31 décembre au plus tard ».
Après, sa brève allocution, le Président a souhaité aux convives bon appétit, bonne année et s’est retiré ! Voilà donc à quoi se résume le » déjeuner de travail « , annoncé dans la lettre d’invitation du MATD aux coalitions. Dans cette lettre, il était fait référence aux concertations socio-politiques initiées par le gouvernement depuis le 7 janvier 2022. D’aucuns pensaient naïvement qu’il s’agissait d’un vrai dialogue! Ceux-là ont été bien servis! Ce n’était que le « dialogue » , version CNRD.
N’importe qui s’intéressant aux problèmes politiques guinéens, a noté les incohérences, les propos contradictoires, le manque de sérieux des initiatives des responsables de la transition sur l’agenda précis de cette période cruciale pour l’avenir de notre pays. Le fait que le CNRD pose des actes d’assainissement de l’Etat, que n’importe quel patriote approuve, ne l’autorise pas à se murer dans des certitudes, avec un agenda connu des seuls initiés et vouloir s’installer au pouvoir pour une période indéterminée. Ce serait une négation de la souveraineté du peuple devant s’exprimer par des élections libres, honnêtes et équitables. Continuer dans cette attitude en cherchant à domestiquer ou tout au moins à neutraliser ou même à chloroformer l’ancienne opposition au pouvoir déchu de l’ex président Alfa Konde, ne peut pas contribuer à garantir la paix sociale et un minimum de consensus, indispensables pour sortir notre pays de ces dictatures politico-ethniques et cette misère et cette décadence sans fin depuis 63 ans. Loin des manipulations politiciennes si savantes soient elles, la voie royale pour sortir notre pays de cette situation déplorable, c’est le dialogue sincère, dans le respect des droits sacrés du peuple de Guinée à exercer librement ses droits démocratiques, pour un Etat, juste, uni, moderne, progressiste, orienté vers la satisfaction des aspirations du peuple à une vie meilleure. Vouloir reposer le sort de la transition sur des conseillers occultes, stratèges en chambre, revanchards, uniquement mus par des desseins ethnicisâtes ou en tout cas inavouables, c’est s’engager sur des sentiers battus déjà connus, avec les deux précédentes transition et ne fera que prolonger les souffrances du peuple qui en a plus qu’assez. Puisse les Guinéens prendre leurs destinées en main, loin des intérêts égoïstes de ses élites et des manœuvres des puissances étrangères. Le peuple de Guinée martyrisé par ses élites prédatrices, corrompues et irresponsables, exige un changement institutionnel pour une véritable renaissance de notre pays et de l’Afrique toute entière.
Il est temps de construire, ensemble et enfin, un véritable Etat de droit au service du peuple et non un Etat au service de lui-même.
Conakry, le 17 janvier 2022
Mamadu Baadiko BAH Président de l’UFD