31è jour. Les nuages se dissipent peu à peu entre Conakry et Rome. Parti de la Guinée le 16 juillet dernier pour l’Italie, le Premier ministre guinéen Mohamed Béavogui pourrait ne plus conduire la Primature sous le CNRD [Conseil national pour le rassemblement et le développement], la junte au pouvoir en Guinée. Une fin de mission sur fond de malaise semble être plus plausible pour ce fils de diplomate [Koma] sous le président Ahmed Sékou Touré.
En prenant son vol le 16 juillet dernier pour officiellement un check-up en Italie, l’ancien patron des opérations du Fonds international de développement de l’agriculture (FIDA) en Afrique de l’Ouest et du Centre, selon certaines indiscrétions, ne pouvait penser un seul instant qu’on lui trouverait rapidement un intérimaire qu’il a « coaché » appelé Bernard Goumou, ministre du commerce. Le locataire du palais de la Colombe en avait comme assez d’avaler des couleuvres du CNRD. S’il a des relations respectueuses avec le colonel Mamadi Doumbouya, président de la transition, Béavogui n’était pas dans le cœur de certains membres de son gouvernement qui ne lui doivent pas leur ascension. Avec ceux-ci, le contact était des plus difficiles. Le PM qui voulait marquer son autorité se heurtait souvent à la résistance de certains de ses collaborateurs qui n’ont d’yeux que pour le locataire du palais Mohammed V.
Actuellement à Rome avec son épouse, loin de ses enfants Mariama Laïla, Abdoulaye, Thierno Souleymane et l’aînée Aïssata, Mohamed Béavogui a bien la tête au pays.
Un Premier ministre qui ne répond pas au profil tracé…
A chaque transition son homme. La transition CNRD cherche sûrement son homme. Mohamed Béavogui, nommé en octobre dernier n’a pas la côte chez les hommes du pouvoir. On lui reproche la non maîtrise de certains dossiers, ses nombreuses sorties de piste mais aussi de jouer parfois contre son camp [pouvoir]. En lecture facile, il n’est pas la poigne du feu Jean Marie Doré, une des grandes figures de la politique guinéennne. Plusieurs fois « dribblé » dans bon nombre de dossiers dont le récent cadre de dialogue inclusif, Béavogui avait du mal à allumer les discussions.
Béavogui « refuse de jouer le Choguel Maiga » pour le CNRD
Dans l’entourage du Premier ministre, l’on donne une autre explication à la situation de ni guerre ni paix. Au sein de son dernier cercle, le Premier ministre est vu comme quelqu’un à qui l’on a empêché de dérouler son agenda de la transition.
« Ses chances de rentrer au pays sont extrêmement minimes. Il ne peut pas s’entendre avec la junte. Les militaires le trouvent pas assez politique et surtout amorphe. Mieux, le pouvoir veut qu’il joue le Choguel Maiga [percutant Premier ministre du Mali). C’est ce qu’il ne fait pas et ne fera pas, connaissant l’homme. Avec sa riche carrière, il ne va jamais se compromettre avec la transition. Donc avec tout ce mélange, l’on peut dire sans risque d’être démenti que Béavogui ne rentrera pas pour reprendre sa place », lâche un proche du PM.
La dernière apparition publique du Premier ministre remonte au 13 juillet dernier à la résidence de l’ambassadeur de France lors de la fête nationale. Près de deux mois après son « pèlerinage à La Mecque pour la 11è fois ».
Ça se bouscule au portillon…
S’il y a un poste qui attire toutes les convoitises en ce moment c’est bien la Primature. Le Palais de la Colombe aiguise l’appetit. Beaucoup de hauts cadres [connus et moins connus] sortent de l’ombre et rêvent de succéder à Béavogui. Les prétendants, nombreux, vendent déjà leurs portaits dans les médias à grande audience. Sous les pieds d’un Premier ministre par intérim qui n’a pas encore dit son dernier mot. A 20 jours du 5 septembre…
Quid du fonds de souveraineté…
Dans les grands milieux de Conakry, il se raconte que le pouvoir a l’arme fatale pour faire plier Béavogui : la gestion du fonds de souveraineté dont le montant est de 15 milliards francs guinéens par trimestre. C’est pourquoi, il est encore prématuré de tirer un trait sur la Primature du natif de Porédaka.
Noumoukè S.